Réflexion sur les tablettes en bibliothèques

J’ai eu l’occasion d’intervenir ou de discuter à plusieurs reprises des tablettes en bibliothèques. On se rend compte que certaines questions reviennent assez régulièrement chez les collègues qui  souhaitent mettre en place ce service. J’aimerais apporter quelques éléments de réponses qui, je l’espère, aideront celles et ceux qui veulent franchir le pas et proposer des ardoises numériques à leurs publics. Evidemment, les réponses reposent sur mon expérience et sur ma conception de ce service. Vous n’êtes pas obligés d’être d’accord.

1) Le matériel :

Apple ou Android ? Il n’y a pas de dogme. Si la collectivité permet d’avoir des tablettes qui tournent sous les deux OS, le choix est vite fait. Faites du multi-plateforme ! Apple a longtemps dominé le marché des tablettes. Or, cette domination devient moins vraie. Les concurrents qui développent sous Android n’ont pas de quoi rougir. Enfin, c’est un avis personnel. Quoiqu’il en soit, il me semble important de ne pas offrir que de l’iOS. Le danger est de s’enfermer et surtout d’enfermer les usagers dans un système d’exploitation. Et on risque de reproduire ce qu’on a fait avec les ordinateurs de nos espaces multimédias : Windows à tous les étages. Je sais que certaines bibliothèques proposent des ordinateurs sous Linux mais c’est à la marge.

2) Accès libre/prêt :

La question de la forme de la mise à disposition est inhérente aux tablettes. Je n’ai pas de réponse particulier. C’est une décision qui se prend en interne, avec l’équipe et dépend du projet  qui est associé aux tablettes. Si votre structure est abonnée à des ressources électroniques type lekiosk.fr, il est certainement plus intéressant de laisser les tablettes en accès libre avec les autres périodiques. Les tablettes peuvent être attachées à des câbles anti-vol pour que les lecteurs puissent les utiliser dans l’espace périodique. Certains collègues sont opposés au câble anti-vol pour les tablettes dans la mesure où ce sont des objets de mobilité. Or avec un fil à la patte, les tablettes ne seraient plus des objets nomades. Je ne suis pas d’accord avec cette conception. Certes les tablettes sont des objets favorisant la mobilité mais on est rarement en mouvement quand on les utilise. Je n’ai jamais vu quelqu’un jouer à Angry Bird en marchant ni utiliser l’appli Le Monde en courant. Par conséquent, il n’y a aucun problème, selon moi, à attacher le matériel. Concernant le prêt, il y a des craintes (justifiées) que le matériel soit abîmé, perdu, volé… Il existe des applis pour localiser, rendre inutilisable les tablettes à distance. Il est également possible de faire signer une charte de bonne utilisation de l’appareil par le lecteur. Je ne pense pas qu’il faille demander un chèque de caution. Cela nécessite d’avoir une régie mais surtout cela constitue un obstacle pour l’utilisateur qui hésitera à tester ce service. Voici un exemple de bibliothèque qui prête des tablettes : BU des Pays de l’Adour.

3) J’achète comment les applis pour mes tablettes ?

Si je suis sous iOS, je passe par l’AppStore. Ah oui, mais il faut que j’ai un compte iTunes. Puis Apple risque de me demander une carte-bleue avec mon compte iTunes et ma bibliothèque n’a pas de CB ! Que faire ?

a) Je pique celle d’un lecteur.

b) Si la bibliothèque n’a pas de CB. Il y a la solution carte iTunes. Apple a commercialisé des cartes permettant d’acheter les applis sur l’AppStore. Comme la marque à la pomme est sympa, je peux synchroniser mes applis pour 5 appareils (On m’a raconté que la limite de 5 était fictive, cela reste à confirmer). Si les machines sont sous Android. Je créé un compte Google pour pouvoir accéder à Google Play, le marketplace de Google. Même principe que précédemment, j ai besoin d’une CB pour acheter les applis. En revanche, Google ne vous limite pas à un nombre de tablette par appli. Demandez à Pierre Angot alias Tredok! Heureusement, il y a aussi des cartes Google Play qui vous permettent d’acheter des applis. Sauf que vous ne les trouverez pas partout. Actuellement, seul Carrefour les vend mais pas dans tous les magasins de France ! En outre, des problèmes existent avec cette carte pour acheter les applis.

4) Les tablettes ne sont pas utilisées :

Il peut arriver que les tablettes ne rencontrent pas le succès escompté. Ce n’est pas que vos usagers sont des méchants mais qu’ils ont besoin d’être accompagnés. Et surtout que les conditions d’utilisation des tablettes soient réunies au maximum. Autrement dit, ne pas mettre un câble antivol trop court. Il faut que l’usager puisse s’asseoir confortablement et manipuler l’objet. Évidemment, il faut que les tablettes soient connectées à internet. Cela implique donc d’avoir accès au wifi de l’établissement. Les tablettes ont été conçues pour être reliées au web. A ma connaissance, aucune tablette n’a été fabriquée sans pouvoir se connecter en wifi. Nos usagers l’ont bien intégré, une tablette doit être connectée !

5) Autoriser ou non le téléchargement d’applis ?

Évidemment, un certain nombre de paramètres entrent en compte dans cette question. Mais parlons dans une situation idéale, celle du monde des bisounours. Je suis d’avis qu’il faut permettre aux usagers de tester l’appareil et d’installer les applis qu’ils veulent essayer. C’est la seule façon de permettre une appropriation complète de l’outil. L’objectif est que le public adapte l’outil à son usage et à ses besoins. Par conséquent, cela implique de vérifier les tablettes après chaque utilisation et de supprimer les données, les cookies, l’historique de navigation. Et surtout, supprimer les comptes mails, twitter, facebook etc de l’usager. La CNIL vous remerciera.

6) Les parents reprochent la présence des tablettes dans la médiathèque :

Reprochez-leur la présence de leurs enfants et la leur au passage ! Demandez leur pourquoi les bibliothèques ne devraient-elles pas permettre ce service ? Montrez-leur en quoi les tablettes sont des objets de jeux mais aussi de découvertes, de récits, d’imagination.

7) Quels types d’ateliers ?

  • Initiation tablette : sur le modèle des ateliers initiation informatique. Montrer à un groupe comment fonctionne la tablette. L’objectif est d’apprendre à utiliser puis maîtriser l’appareil. Veillez à constituer un groupe en fonction du nombre de tablettes. Cet atelier peut être l’occasion de montrer comment utiliser le wifi, comment télécharger une appli, comment verrouiller la rotation de l’écran, comment désactiver les notifications, comment désactiver le traceur de publicité ( eh oui !), comment constituer des dossiers d’applis, comment vraiment fermer une appli, comment je dé/synchronise les applis (Dropbox, photos…). Cela peut paraître basique mais cela correspond aux besoins des utilisateurs qui découvrent les tablettes.
  • Atelier heure du conte numérique : pour les bouts de choux.
  • Atelier jeu : jeu collectif vidéoprojeté. Les participants jouent ensemble à tour de rôle
  • Atelier découverte d’appli : prendre deux ou trois enfants et leur faire découvrir des applis pendant une durée déterminée (30 minutes)
  • Atelier J’apprendsAmeServirDeMonIpadPourMesEtudes :  On peut leur montrer des applis qui vont pouvoir réutiliser pour leurs études (Candy Crush, ça va deux secondes). Appli d’ocerisation pour leur permettre de scanner des documents et les transformer ensuite en texte manipulable. Les tablettes sont propices au développement de la #CopyParty. On peut aussi leur apprendre à utiliser des applis comme Pocket, Evernote, Diigo, Documents pour qu’ils construisent leur écosystème informationnel personnel. Si les jeunes démontrent une certaine facilité à utiliser les nouveaux outils numériques, c’est à nous de les aider à développer une capacité à les maîtriser.
  • Atelier jeux video : exemple de Minecraft
  • mais aussi des ateliers musiques, vidéos, d’écriture…

8) Où trouver des bonnes applis ?

La production d’applis est particulièrement importante. Il convient d’organiser une veille sur cette thématique pour connaître ce qui se fait en matière d’applis mais surtout ce qui se fait de bien ! Il existe différentes sources sur lesquelles vous pouvez vous appuyer :

Bonus :

Voici les slides d’une présentation des applis et des tablettes en bibliothèques organisée à Grenoble.

Et vous ? N’hésitez pas à rajouter vos remarques, difficultés, expériences en commentaire de ce billet !

27 commentaires à propos de “Réflexion sur les tablettes en bibliothèques”

  1. Rétroliens : Veille hebdomadaire – 12.01.14 | Biblio Kams

  2. Merci Thomas pour cet article concret et très utile! Pour ma part j’essaie toujours d’insister sur le fait que les tablettes que nous mettons à disposition sont l’occasion de créer des dispositifs de médiation, tout simplement en les pré-configurant avec des dossiers thématiques d’applications. On peut imaginer des sélections d’app pour enfants, ou de livres numériques enrichis… A mon avis, pour éviter l’effet exclusif « show room » de la Fnac on doit miser sur des tablettes qui font connaître quelques unes de centaines de milliers d’app disponibles. Après cela suppose à mon avis d’investir dans des chariot pour les gérer et des réinitialiser avec la configuration choisie, comme celui-ci http://store.apple.com/fr/product/H3635ZM/A/chariot-powersync-pour-ipad-de-bretford

    Bon c’est ce que tu disais dans ce billet, mais j’en remet une louche 😉 http://biblionumericus.fr/2013/04/22/quand-le-bibliothecaire-devient-applithecaire/

  3. Pour compléter les types d’ateliers possible avec ce matériel, il me semble important de profiter de l’aspect nomade du matériel. Du coup, on peut se balader avec un groupe, prendre des notes ou des photos, faire un journal de bord…
    Côté nomade qui sera peut-être utile dans les projets liés à la réforme des rythmes scolaires. A voir.
    Merci pour cet article, Thomas !

  4. Rétroliens : Réflexion sur les tablettes en bibliothèques | Biblio Numericus | la bibliothèque, et veiller

  5. Bonjour Thomas,

    Je fais partie de ceux qui pensent que les tablettes *ne doivent pas* être attachées… Evidemment, on n’a jamais vu quelqu’un courir en lisant Le Monde (cela dit, on n’a même jamais vu quelqu’un utiliser cette appli chez nous, mais c’est une autre histoire !), mais la notion de support nomade implique que l’usager doit pouvoir s’installer où il le souhaite et dans la position qui lui fait plaisir dans la médiathèque : au rez-de-chaussée ou au premier étage, dans l’espace périodiques ou en section jeunesse, dans des fauteuils ou devant une table, assis par terre voire même allongé sur des coussins… C’est le propre de la tablette. Les attacher revient à imposer aux usagers un lieu et donc une certaine utilisation de la machine, tout comme on le fait déjà avec les ordinateurs.

    Ici (à Albi), on il y a une vraie diversité dans les usages : à table à côté des cours pour des étudiants ; dans un fauteuil bien confortable un peu partout dans les espaces pour les accès Internet ; à proximité des enfants pour les parents qui souhaitent garder un oeil sur leur progéniture ; assis par terre sur des coussins pour les ados qui jouent à plusieurs sur une tablette… Si j’attache les machines, elles ne pourront plus servir à tout ce petit monde. Et de façon très pragmatique, comment je fais pour choisir le meilleur endroit possible pour les attacher ? Dans l’espace actualité, les ados n’iront pas ; en section jeunesse, au contraire, il n’y aura plus que ça ; dédier un espace au numérique risque de faire fuir tout le monde…

    Quant aux vols, dégradations, pertes et autres joyeusetés, je ne dis pas qu’il n’y a pas de risque, mais je ne pense pas qu’il soit aussi élevé qu’on le pense. Partir du principe que les usagers sont des voleurs me gêne sincèrement. Il existe d’autres façons de les sensibiliser et donc de les responsabiliser, il me semble. Mais je sais bien que ce sont des débats sans fin !! 😉

    Quoi qu’il en soit, merci pour cet article ! 🙂

  6. Bonjour Thomas,

    Est-ce possible d’obtenir vos coordonnées professionnelles ?

    Je ne trouve pas sur votre blog l’endroit où vous envoyer un message en privé.

    Merci

    Laure

  7. Rétroliens : La médiation avec les jeux vidéo | Louise et les canards sauvages

  8. Rétroliens : Réflexion sur les tablettes en biblioth&...

  9. Rétroliens : Réflexion sur les tablettes en bibliothèques | Biblio Numericus | la bibliothèque, et veiller

  10. Rétroliens : Réflexion sur les tablettes en biblioth&...

  11. Rétroliens : Reflexion sur les tablettes en bibliotheque ! | bibliotab'

  12. Rétroliens : Scénarios d’usages pour les tablettes en bibliothèque publique (+ une liste de ressources) | Bibliomancienne

  13. Rétroliens : Reflexion sur les tablettes en bibliotheque ! | bibliotab'

  14. Rétroliens : Article à lire: «Les bibliothèques dans l’écosystème du livre numérique» de Marie D. Martel | Le libre accès

  15. Rétroliens : Le libre accès | Le libre accès

  16. Rétroliens : Réflexion sur les tablettes en biblioth&...

  17. Rétroliens : Réflexion sur les tablettes en biblioth&...

  18. Bonjour,

    Je travaille dans une petite médiathèque de la Loire, et nous possédons 5 tablettes qui dorment dans un placard depuis 2 mois 🙁
    Nous avons donc décidé de laisser « traîner » ces tablettes un peu partout dans la médiathèque afin que les curieux les manipulent enfin !
    Bien que je comprenne les personnes qui sont contre le fait de leur mettre un fil à la patte, il serait beaucoup plus simple pour nous d’utiliser des étuis et des câbles antivols…
    Auriez-vous des références de fournisseurs qui proposeraient ce genre de matériel ? Je suis un peu démunie devant le choix proposé…
    Merci d’avance

  19. Rétroliens : Réflexion sur les tablettes en biblioth&...

  20. Rétroliens : Réflexion sur les tablettes en bibliothèques – Tablettes en bibliothèques

  21. Bonjour,
    Cet article super intéressant date un peu. Avec le recul, avez vous des remises en cause ou des nouveaux sujets qui viendraient éclairer d’un regard plus récent ce sujet ?
    Merci
    Aude

  22. Rétroliens : La médiation avec les jeux vidéo | Louise et les canards sauvages

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