Du nouveau sur PNB

pnbLe projet PNB de Dilicom avance de plus en plus. Les établissements bêta-testeurs vont bientôt pouvoir mettre en place auprès de leurs publics ou une partie d’entre eux la mise à disposition de livres numériques. C’est bien de cela dont il s’agit  : de la mise à disposition et en aucun cas du prêt. En effet, on ne peut prêter que ce que l’on possède (sauf les banques). Or avec ce type de dispositif (mais c’est valable pour Numilog et consorts), la bibliothèque n’est pas propriétaire des livres numériques qu’elle a acheté. Les établissements payent des licences d’accès au fichier inscrit dans une temporalité généralement fixée par l’éditeur. Je ne vais pas revenir sur PNB mais sur certains éléments de l’offre relayée par Feedbooks. Si vous voulez une analyse de PNB, je vous invite à aller voir du côté de Bibliobsession.

Cette semaine Feedbooks a annoncé l’ouverture du site collectivités.feedbooks qui fait état des œuvres disponibles pour le PNB. Ce site dédié aux collectivités nous permet d’en savoir plus sur les services proposés par Feedbooks mais surtout sur le catalogue disponible. Le catalogue est actuellement constitué de 3154 titres. Les offres présentées sont celles de Gallimard, Flammarion et La Martinière.

Une offre qui se révèle sous sa véritable facette

Le site Collectivités de Feedbooks propose des recherches par facettesfeedbooks

Vous avez la possibilité d’affiner votre requête en utilisant certaines facettes :

  • Formats (epub/PDF)
  • Type d’offre (streaming/téléchargement)
  • Nombre de prêt
  • Durée de la licence (et oui, on n’est pas propriétaire des livres achetés
  • Le prix

 

On constate que l’offre est encore mince. C’est tout récent me direz-vous. Cela révèle aussi la stratégie de certains éditeurs et leurs réticences à voir des bibliothèques proposer des livres numériques (don’t forget ! ). On remarque également la présence de mesures techniques de protection autrement dit des DRM. Cela rentre en totale contradiction avec les recommandations de CAREL sur le livre numérique en bibliothèque publique. Rappelons au passage que COUPERIN a rejeté l’offre de Numilog à cause de la présence de DRM.

Regardons plus en détails une offre : l’exemple Du côté de Canaan de Sebastian Barry

feedbooks 2Ce titre peut être acheté pour pouvoir être téléchargé ou consulté en streaming in-situ avec 9999 connexions simultanées. Certains livres ne sont accessibles qu’en streaming in-situ ! (Rappel : Immatériel propose de la lecture déconnectée). C’est gentil de proposer cette possibilité technique mais je ne suis pas convaincu que le développement de la lecture numérique puisse se faire sur un ordinateur à l’intérieur même de la bibliothèque. Puis c’est sans compter les problèmes d’usages avec les autres publics des espaces multimédias des établissements. En téléchargement, le titre est accessible pour 3 ans. La licence est de 1095 jours (On a l’impression que c’est plus long quand on choisit le jour comme unité…) Les bibliothèques pourront mettre à disposition ce livre 20 fois pendant 21 jours. (Pour info : certains titres interdisent les accès simultanés). On ne peut que déplorer le principe de la chronodégradabilité imposée. Par ailleurs, sera-t-il possible pour les usagers de prolonger leur livre ? Si oui, est-ce que la prolongation sera considérée comme un téléchargement supplémentaire ? Allez expliquer à vos usagers les différences de durée de prêt si la durée est de 28 jours pour les livres papiers, cd, dvd et 21 jours pour les livres numériques.

Les livres sont accompagnés d’un petit cadeau : ACS4, le drm d’Adobe. Je pense qu’il est important de rappeler qu’Adobe est un partenaire de confiance sur lequel les éditeurs peuvent compter. L’ACS4 se traduit par l’interdiction pour les lecteurs de copier/coller certains passages du livre. C’est pourtant possible avec des livres papiers. Ils ne pourront pas non plus imprimer des extraits du livres. Ces limitations varient selon les titres. Le Ctrl+C/Ctrl+V est parfois autorisé de façon limitée mais uniquement en streaming… Enfin, je suis curieux de voir ce que signifie « Périphériques autorisés : 6 » pour un accès en streaming. Cela doit certainement être une erreur.

On constate rapidement que l’offre est loin d’être satisfaisante (catalogue, verrous, accès). Je tiens à préciser que je n’accuse pas Hadrien Gardeur et son équipe de Feedbooks qui est une librairie et n’est absolument pas responsable des choix des éditeurs. Bien au contraire, je remercie sa volonté de transparence et de visibilité de l’offre. Par ailleurs, ce n’est pas l’idée de Dilicom que je critique. Au contraire, l’idée d’un hub réunissant plusieurs acteurs de l’écosystème du livre numérique et redonnant une place aux libraires constitue une avancée.

Et vous qu’en-pensez-vous ?

13 commentaires à propos de “Du nouveau sur PNB”

  1. Je trouve que la conjonction du nombre de prêts limité (simultanés ou non) avec la chronodégradabilité est une très nette régression. Je sais bien que toutes les bibliothèques n’ont pas pour mission prioritaire la conservation et le patrimonial, mais ça n’empêche que la centralisation des « masters » chez les distributeurs me gène profondément. Quand au Streaming, c’est encore pire, puisqu’il n’y a pas même de copie complète, même chiffrée.

  2. J’en pense que c’est précisément pour certaines de ses raisons que certaines grandes bibliothèques de France (bon ok, je n’ai que Lyon comme exemple en tête) n’ont pas creusé le projet PNB avec Dilicom. DRM version Adobe, chronodégradabilité, fichier non possédés mais uniquement un droit d’accès, streaming sur place uniquement… autant d’élémens, comme vous le pointez, qui ont été « flaggés » par CAREL ou COUPERIN.

    Malheureusement, le marché (en l’occurrence, les éditeurs) n’a pas l’air pressé de développer une offre à destination des bibliothèques. Alors entre rien du tout et un mauvais produit, les bibliothèques qui se sont lancées dans l’expérimentation PNB pourront au moins nous dire à quel point le produit est mauvais.
    Et comme d’habitude dans ces situations, si aucun éditeur ne propose un effort collectif (comme l’ont fait les éditeurs de BD avec Iznéo), celui qui agira en premier paiera tous les coûts pour s’assurer une place prépondérante. Mais qui est prêt à payer ? Ou, pusillanimes, tous les éditeurs attendent-ils qu’un autre paient tous les coûts, quitte à se contenter d’une deuxième ou troisième place ?

  3. En attendant, d’autres éditeurs ont tout de même fait des offres plus équitables, Numeriklivres par exemple, ou publie.net /Publie+papier mais c’est au final un catalogue très réduit (en relatif) et hors des sentiers battus et rabattus demandés par le public.

  4. Salut Thomas,

    Merci pour ce billet récapitulatif.
    Comme tu l’as fait remarqué, nous ne faisons que porter cette offre et non la définir, mais nous faisons tout ce qui est en nos moyens pour rendre cette offre la plus compréhensible possible: que ce soit pas le biais de facettes, d’une visualisation simplifiée des conditions lors de la navigation, ou détaillée sur la fiche du livre.
    De même pour ce qui est de rendre le catalogue PNB consultable par tous: nous avons fait le choix de ne pas cacher ce catalogue derrière une interface qui aurait nécessité un compte client, mais au contraire de la rendre publique et le plus tôt possible, même si l’offre est amenée à évoluer dans les prochains mois (le catalogue est mis à jour tous les jours chez nous).

    Il me parait par contre important de répondre à un certain nombre de points évoqués dans ce billet :

    1) L’offre est mince car elle est encore en cours de constitution. PNB est actuellement en phase de test et non en phase de commercialisation. Ce que nous voyons donc pour l’instant ne correspond qu’à deux distributeurs et donc deux types de licences: Gallimard/Flammarion et La Martinière. L’arrivée d’autres distributeurs devraient considérablement étendre le catalogue, et nous verrons sûrement d’autres politiques de prix et d’autres types de licence. Même pour ce qui est déjà communiqué pour le moment, rien n’est totalement fixé et les choses peuvent encore bouger (il y a moins d’une semaine, La Martinière a retiré la limite de 365 jours sur ses ouvrages).

    2) L’offre en streaming pour les deux distributeurs évoqués est en complément de l’offre en téléchargement et pas l’inverse. Le coeur de l’offre c’est bien le fichier EPUB ou PDF, l’idée c’est qu’en plus de cette possibilité, les lecteurs peuvent consulter en intégralité les ouvrages achetés tant que la licence n’est pas expirée. La lecture déconnectée n’a pas de sens pour un accès in-situ, pour une utilisation nomade, c’est par un téléchargement que les choses se feront.

    3) Tous les titres proposent bel et bien un accès simultané pour l’instant, le titre évoqué est une erreur dans le catalogue Flammarion (il suffit de voir les termes de licence pour voir que c’était un test). J’ai déjà fait remonter cette erreur, on repère plus facilement les anomalies dans notre catalogue que via Dilicom du fait qu’on a mis en place des facettes.

    4) La durée maximale d’emprunt est en effet déterminée par le distributeur. Gallimard/Flammarion optent pour 21 jours et La Martinière pour 59 jours. Je suspecte l’offre Gallimard/Flammarion d’avoir gardée la valeur par défaut de ACS4 (solution DRM de Adobe) plutôt qu’autre chose. A noter bien sûr que cette durée est maximale, libre à la bibliothèque ensuite d’adapter cette limite avec une valeur plus bas par le biais de son SIGB ou portail (par exemple 28 jours au lieu de 59 jours).
    Sur d’autres marchés, ce sont les listes d’attente qui posent le plus de problèmes, donc il sera important pour les bibliothèques de faire les bons choix sur le nombre d’accès simultanés et la durée d’un emprunts, vu que ce sont les deux paramètres « bloquants » et qui peuvent rallonger cette liste d’attente.

    5) Il n’y a pas de notion de renouvellement d’un prêt avec ACS4, donc une prolongation serait l’équivalent d’un nouveau prêt, avec toutes les contraintes que cela implique (devoir télécharger de nouveau le livre et ainsi de suite). Par contre ce n’est pas le cas de LCP qui permettra bel et bien de prolonger un prêt, à condition d’une intégration fine avec le système de la bibliothèque (plus de détails sur LCP ci-dessous).

    6) La partie DRM de notre tableau récapitulatif concerne uniquement ACS4 et donc pas le streaming. ACS4 permet de limiter le nombre de périphériques sur lequel un titre peut être lu. Si cette limite est de 6, cela signifie que le livre peut être ouvert sur 6 ordinateurs différents ainsi que 6 périphériques mobiles différents en même temps.
    Une fois que d’autres offres seront arrivées, nous ferons un récapitulatif plus détaillé pour bien expliquer l’ensemble de ces termes.

    7) Personne n’est vraiment satisfait de devoir s’appuyer sur Adobe, et j’ai été le premier à pointer les défaillances de leur système mais aussi de leur politique (cf le billet d’Actualitté auquel tu fais référence).
    Si pour cette phase de test, les téléchargements se feront en effet avec ACS4, l’objectif pour de nombreux distributeurs restent de basculer sur une autre solution: LCP (Lightweight Content Protection) porté par la fondation Readium.
    LCP est beaucoup moins contraignant à l’usage et permettra pour les bibliothèques qui font les bons choix techniques (une distribution de leur catalogue pensé pour les usages mobiles avec un catalogue OPDS) de rendre la partie DRM totalement transparente.
    Le plus gros risque pour les bibliothèques est lié aux liseuses: celles-ci étant rarement mis à jour (voir jamais) et ne supportant ni le streaming, ni LCP (pour l’instant), le parc de liseuses des bibliothèques et l’adoption des liseuses par les usagers des bibliothèques risque d’être le plus gros frein à une expérience optimale.

  5. Rétroliens : Veille hebdomadaire – 02.03.14 | Biblio Kams

  6. Merci Thomas pour ce billet très limpide sur l’offre très très décevante de Feedbooks. Et je dirais même : énervante ! Je ne reviens pas sur tous les arguments techniques / idéologiques développés, je suis d’accord avec l’ensemble. J’ajouterais simplement que les tarifs pratiqués sont prohibitifs ! Il faudrait faire une moyenne qui serait fastidieuse mais les titres sont vendus (pardon, loués) facilement 20 à 30% plus cher que le prix public.Sachant que la plupart des bibliothèques payent leur livres avec un rabais plafonné de 9%, je ne vois pas qui va se lancer dans cette « affaire ». Pas moi en tout cas ! (on a déjà donné avec Numilog)

    • Bonjour,

      Juste une précision, ce n’est pas Feedbooks qui est responsable de l’offre. Feedbooks est un libraire qui vend ce que les éditeurs acceptent de mettre en vente… Autrement dit, pas grand chose pour le moment. Mais tout à fait d’accord sur le reste.

  7. Merci Thomas pour ce billet, pour rebondir sur l’avant dernier commentaire, je me demande à qui va cette augmentation du prix, sachant que toutes les « compensations » vont dans le secteur de l’imprimé aux auteurs via des sociétés de gestion de droit. Ici, le surplus va bien dans la poche de l’éditeur, sauf si ceux-ci on mentionnés ces offres avec des conditions spéciales dans les contrats avec les auteurs. S’il y a surplus, c’est que la logique de compensation est activée, cette logique est perverse (je l’avais expliqué ici à partir du cas Belge http://www.bibliobsession.net/2013/03/21/de-la-pseudo-necessite-de-compenser-le-pret-des-livres-dans-les-bibliotheques/ ) mais si elle existe elle doit au moins faire l’objet d’une répartition transparente… ce qui n’est pas du tout le cas actuellement !

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