Faire entrer le loup dans la bergerie: Adobe, PNB, Usagers

Il y a des jours où on se dit qu’on aurait mieux fait de ne pas ouvrir son agrégateur de flux RSS (remix d’un célèbre adage que je vous laisse deviner). Quel a été mon écoeurement quand j’ai découvert ce billet d’@Aldus. Je n’y ai pas cru. Adobe, cette maison si honnête et respectueuse, ne pouvait pas se compromettre en réalisant ce type d’outrage. Je suis donc aller à la source sur The digital reader pour réaliser que c’était vrai. Sans compter qu’ActuaLitté, Archimag et ZDnet ont relayé cette info : Adobe joue la NSA et espionne nos comportements de lecture numérique via les DRM et le backdoor Adobe Digital Editions. Si vous n’avez pas envie de vous farcir chacun des articles, voici un résumé de la situation. Adobe à travers son logiciel Adobe Digital Editons analyse et collecte chacun de vos comportements liés à vos livres numériques. L’entreprise sait quel livre vous avez ouvert, à quelle page vous en êtes, analyse l’ensemble de votre disque dur (c’est cadeau). Adobe nous avait déjà amusés avec le vol de coordonnées d’utilisateurs l’an dernier ou encore l’annonce surprise de la version 3 d’ADE Mais là, c’est le 0 de trop qui fait déborder le vase numérique.

Le plus terrifiant dans cette affaire est peut-être la complicité (malgré eux) des établissements de lecture publique qui propose un accès aux livres numériques à leurs usagers. Les établissements de prêt ne sont pas responsables des agissements d’Adobe mais rendent possible l’espionnage des usagers à travers des services comme PNB ou Numilog. Ces dispositifs fonctionnent et reposent sur Adobe et son Adobe Digital Editions pour gérer les DRM. Il devient donc urgent de mettre en place des alternatives qui garantissent les droits des lecteurs numériques et le respect de leur vie privée. La solution ne consiste pas à utiliser des versions dépassées d’Adobe Digital Editions mais bien de se passer d’ADE ! Le rôle des bibliothécaires n’est pas de participer à l’exploitation des données personnelles des usagers mais bien au contraire de les protéger. Des bibliothécaires américains organisent des ateliers qui aident les usagers à protéger leur vie privée sur Internet pendant que nous nous rendons complices d’Adobe Digital Editions. Ce n’est pas la première fois que cela arrive. A travers nos outils comme le portail de bibliothèque nous contribuons à l’exploitation des données personnelles des usagers. Réfléchissez à deux fois avant de mettre des boutons de partage Addthis sous vos notices de catalogue ! Organisons des ateliers Privacy Badger (une liste d’outils intéressants à retrouver ici)  à destination de nos usagers pour les aider à préserver leurs données personnelles ! Positionnons-nous clairement contre ces agissements comme peut le faire l’American Library Association sur la neutralité du Net !

Comme le souligne ActuaLitté en conclusion de son article, le Ministère de la Culture et (surtout) de la Communication par la voix de Fleur Pellerin a beau jeu de vouloir mettre en place une déclaration des Droits de l’homme numérique si dans le même temps les services publiques de la connaissance contribuent à l’exploitation des données personnelles des usagers.

6 commentaires à propos de “Faire entrer le loup dans la bergerie: Adobe, PNB, Usagers”

  1. Rétroliens : Faire entrer le loup dans la bergerie: Adobe, P...

    • Oui, c’est vrai. Mais j’ai peur que LCP ne soit atteint du syndrome du garçon qui criait au loup. A force de crier LCP, plus personne n’y croit. Plus sérieusement, je suis impatient de voir ce que ça donne.

  2. Il y a un enjeux important pour une bibliothèque a mieux connaître le comportement de ses usagers sur son catalogue et dans les bases de données qu’elle propose. Dans les bibliothèques universitaires, cette connaissance est encore largement monopolisée par les fournisseurs de contenu (Elsevier, Lexis, etc). C’est pourquoi Couperin a mis en place le projet AnalogIST http://analogist.couperin.org/ une plate-forme nationale qui héberge un analyseur de logs ezPaarse. La bibliothèque sera en mesure d’analyser finement le profil de l’utilisateur, son cheminement, les ressources consultées (c’est un peu ce que fait Adobe, non ?), de corréler ces données avec le niveau d’étude ou le labo d’origine. L’objectif est de mieux adapter l’offre à la demande de ressources électroniques dans un contexte de restriction budgétaire. Il y a une commande « loganonymizer » dans ezPaarse qui permet d’anonymiser les logs (login, nom de la machine) : sera t-elle- systématiquement utilisée ?

  3. Rétroliens : fff | La Bibliothèque de l'Ecole nationa...

  4. Rétroliens : Les bibliothèques, sanctuaire de la vie privée ? | Biblio Numericus

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