Contrefacteur pour une juste cause

Edit du 7 Novembre : Il y a un mois jour pour jour, nous étions plusieurs à participer à un mouvement de désobéissance civile. Nous le savions et cela devait arriver, Le Livre de Poche qui gère les droits de la traduction française du Journal d’Anne Franck s’est opposé à ces publications illégales des fichiers sur nos sites. Mes compagnons de route (Olivier, Daniel et Alexis et Véronique ont reçu une lettre de mise en demeure les invitant à retirer le plus rapidement possible l’accès non autorisé aux fichiers. Je n’ai pas encore reçu cette lettre mais ce n’est qu’une question de temps. C’est pourquoi je supprime dès aujourd’hui l’accès aux fichiers et en profite également pour présenter mes excuses aux traducteurs de la version française ainsi qu’au Livre de Poche.
Toutefois, le combat n’est pas terminé et nous entendrons encore parler du Journal d’Anne Frank en 2016 quand elle sera véritablement entrée dans le domaine public quoiqu’en dise le Fonds Anne Frank. Comme le dit Olivier Ertzscheid dans son billet « A compter du 1er Janvier 2016, conformément aux engagements pris, et conformément à la loi, nous, citoyens, politiques, « donnerons » à l’oeuvre d’Anne Frank la seule place qu’elle mérite : celle du domaine public. Parce que le domaine public n’est pas « Het Achterhuis », il n’est pas cette « annexe », il est notre maison commune, celle de l’échange, celle du souvenir, celle où se construit et se perpétue la mémoire collective grâce à l’accès autorisé aux oeuvres, sans contraintes, sans restrictions, sans dissimulation. »

« Celui qui combat peut perdre, mais celui qui ne combat pas a déjà perdu »

Bertolt Brecht

La nouvelle est tombée aujourd’hui dans les colonnes de Livres Hebdo, le Journal d’Anne Frank n’entrera pas dans le domaine public en 2016. Comme chacun sait, Anne Frank a fait partie des millions de victimes de la barbarie nazie. Mais avant de mourir elle a eu le courage de tenir un journal qui constitue un des plus précieux témoignages d’une sombre période de notre histoire.

Selon le Code de la Propriété intellectuelle, un auteur entre dans le domaine public 70 ans après sa mort. A condition qu’il ne soit pas mort pour la France ou tout autre exception dont le seul but est d’enrichir les éventuels ayant droits. A cause de ces dispositions, Guillaume Apollinaire est entré dans le domaine public l’an dernier près de 100 ans après sa mort. De même, Antoine de St-Exupery a eu le malheur de mourir pour la France en 1944 et n’est toujours pas dans le domaine public en France. Il l’est pourtant dans le reste du monde…

Cette fois-ci, c’est au tour d’Anne Frank d’être exclue du domaine public parce que son journal est une oeuvre posthume publiée en 1980. Comme le rappelle l’article de Livres Hebdo, cette catégorie d’oeuvres constitue un cas à part et ne peut entrer dans le domaine public que 50 ans après sa publication. Autrement dit, en 2030 ! Quelle curieuse façon d’honorer la mémoire d’une victime du nazisme. Ce genre de témoignage devrait être diffusé le plus largement possible pour ne jamais oublier les heures sombres de notre histoire. On devrait pouvoir mettre en place un système pour que cette oeuvre soit lue par le plus grand nombre, qu’elle puisse être traduite librement, qu’elle soit éditée par n’importe quel éditeur. Ce système, c’est le domaine public !

Il est absolument injuste et immoral qu’une Fondation détienne un monopole sur l’exploitation de cette oeuvre. Il est tout aussi inacceptable que nos représentants politiques ne s’opposent pas publiquement et ouvertement à cette situation. A l’heure où l’on parle de la République numérique, on mesure combien il est urgent de reconnaître le domaine public en lui accordant une définition positive qui permettrait de lutter contre toutes ces dérives, tout ces copyfrauds.

Nous sommes plusieurs (ici, ici et à être choqués par cette annonce et agissons à la hauteur de notre écoeurement en anticipant l’entrée dans le domaine public d’Anne Frank. Vous pourrez trouver une version illégale du journal d’Anne Franck. Nous avons conscience du caractère illégal mais nous sommes des contrefacteurs pour une juste cause.

2 commentaires à propos de “Contrefacteur pour une juste cause”

  1. Rétroliens : Extension du domaine (public) de la lutte | Louise et les canards sauvages

  2. Bonjour,

    C’est dommage d’avoir craquer sous la pression. Mais en même temps je peux comprendre.

    Depuis peu, je suis résident norvégien. J’ai un blog dont la société est basée au luxembourg et mes serveurs sont hébergé par google au USA.

    Je me propose de mettre en accès direct ce livre, que j’ai lu au collège il y a longtemps et qui m’avait plu. Surtout en ces temps sombres ou l’extreme droite monte en force en France, il est important de rappeler à la France, que l’Histoire nous a clairement montré ce que ça donnait.

    Je ne trouve pas ce livre en version gratuite sur le net, pouvez-vous me l’envoyer par mal svp? Je vous en remercie, et ce pour le souvenir contre l’horreur.

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