Bibliothèque, sobriété et réduction de l’empreinte environnementale du numérique

Les collectivités de plus de 50000 habitants devront avoir mis en place une stratégie numérique responsable d’ici le 1er janvier 2025. C’est ce que prévoit la loi visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique du 15 novembre 2021 (REEN). L’article 35 de la dite loi dispose même que les villes d’au moins 50 0000 habitants doivent élaborer un programme de travail fixant le cap de la stratégie de réduction de l’empreinte carbone du numérique, au plus tard le 1er janvier 2023.

Autrement dit, 133 communes ont du pain sur la planche ! Généralement, les villes de plus de 50 000 habitants possèdent au moins un établissement de lecture publique sur le territoire. En quoi et comment les bibliothèques peuvent-elles s’inscrire dans ce programme de travail à l’échelle de leur collectivité ?

Les propositions en mode greenwhashing

  • Premier conseil : limiter le recours aux mails en arrêtant le répondre à tous quand la réponse est susceptible d’intéresser qu’un-e seul-e collègue. Si vous souhaitez comprendre comment fonctionne l’envoi de mail et le protocole SMTP, je vous invite à lire ce chapitre du cours Les réseaux de zéro qui montre l’infrastructure nécessaire pour l’envoi et la réception de mail. Cela rend peut-être plus concret l’empreinte carbone que le numérique représente derrière son côté virtuel.
  • Deuxième conseil : n’imprimer que ce qui est nécessaire
  • Troisième conseil : éteindre les ordinateurs (et la lumière des toilettes)
  • Quatrième conseil : réduire la durée des sessions sur les postes publics
  • Cinquième conseil : demander à proxynator de bloquer YouTube et Twitch
  • Sixième conseil : éteindre la baie de brassage à la fermeture de la bibliothèque

L’écologie, c’est sérieux

On arrête de déconner, la Terre est en train de brûler, nous devons agir collectivement pour permettre aux milliardaires de continuer à prendre leur jet privé. Les bibliothèques peuvent contribuer à cette feuille de route de plusieurs manières.

Bib Market

Le chapitre 2 de la loi REEN est consacré au renouvellement des terminaux. Certes les bibliothèques ne sont pas les lieux réputés pour renouveler chaque année leur parc informatique. Cependant, nous pouvons nous inspirer de ce chapitre pour l’intégrer dans notre façon d’aborder la médiation numérique auprès des usagers. En effet, les bibliothèques qui proposent de l’assistance numérique sont au premier plan pour inciter les usagers à continuer à utiliser leur matériel vieillissant en leur donnant un second souffle grâce aux logiciels libres. Outre l’avantage de pouvoir reprendre le contrôle sur nos données personnelles, les logiciels libres sont parfois réputés pour être moins gourmands en ressources pour fonctionner sur les appareils. L’univers Linux et ses nombreuses distributions sont l’occasion de pouvoir continuer à utiliser un vieil ordinateur grâce à un système d’exploitation léger pour fonctionner. (Linux Lite, Lubuntu, ZorinOS…). L’organisation d’Install Party est l’occasion de participer à la réduction du renouvellement des terminaux en leur donnant une nouvelle vie.

Donner plutôt que jeter

Même si les bibliothèques ne renouvellent pas leur parc informatique tous les quatre matins, il arrive que les vieux postes soient remplacés par des neufs. Depuis le 10 novembre 2022, les collectivités peuvent désormais céder gratuitement le matériel informatique à des associations. Pour pouvoir bénéficier de cette session à titre gratuit, les associations doivent être reconnues d’utilité publique ou d’intérêt général. En d’autres termes, des associations comme Emmaüs-Connect peuvent bénéficier de ce nouveau décret et ainsi participer à la fois à la réduction de l’empreinte carbone et lutter contre la fracture numérique en mettant à disposition des personnes précaires des ordinateurs reconditionnés.

Publier peu mais publier mieux

Pendant longtemps pour être visible et identifié par les bots des moteurs de recherche, la stratégie a consisté à publier beaucoup de contenus pour pouvoir remonter dans les résultats de recherche. D’une part, publier beaucoup de contenus est une activité chronophage qui nécessite une organisation rigoureuse en matière de médiation numérique des savoirs. Mais surtout cette stratégie n’est plus recommandée en matière de référencement. Les règles SEO évoluent et Google préfère privilégier du contenu de qualité disposant d’une véritable valeur ajoutée plutôt que du putaclic ou du réchauffé copié par-ci, par-là. 

Un peu de low-tech

Les sites des bibliothèques sont la plupart du temps des produits édités fournis par des prestataires. Déjà que le RGAA n’est pas toujours appliqué, les principes low-tech ne sont probablement pas intégrés dans l’élaboration des sites de ces éditeurs. Quelques exemples de sites web low-tech : https://hackstock.net/, https://www.mucem.org/, https://solar.lowtechmagazine.com/

Évidemment, nos prestataires ne proposent pas des sites web low-tech, d’ailleurs testez l’empreinte de votre site web https://www.websitecarbon.com/, vous serez peut-être surpris-e du résultat. (trigger warning, la pertinence de ce genre d’outils est toujours sujet à discussion. En revanche, il présente l’intérêt de s’interroger sur la façon dont on administre nos sites). En attendant d’avoir des sites peu énergivore, nous pouvons d’ores et déjà adopter des écogestes. Geoffroy Dorne, designer engagé sur cette question de la sobriété numérique, recommande quelques règles que nous pouvons adopter quand on publie du contenu sur nos sites mais aussi au moment de l’élaboration du cahier des charges dans le cadre d’une refonte de site web par exemple.

  • Limiter le recours à des technos qui consomment de l’énergie : JavaScript en tête. C’est joli mais ça pollue.
  • Réduire l’usage à la vidéo en mode embed et aux photos en HD trop lourdes.
  • Tout nos contenus ont-ils vocation à rester en ligne ? On peut ajouter une date de fin de publication pour éviter de surcharger son site et réduire les pages zombies.
  • Abandonner les boutons de partages sur les réseaux sociaux
  • D’autres conseils que j’ai déjà donnés sur Biblio Numericus

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