Ma semaine de la vie privée / jour 1

Photo by Rishabh Varshney on Unsplash
Photo by Rishabh Varshney on Unsplash

Chaque année les bibliothécaires américains organisent un temps fort consacré à la protection de la vie privée. La privacy week est l’occasion de rappeler que les bibliothèques ont un rôle un jouer dans cette bataille pour reprendre le contrôle sur nos données personnelles. En effet, les bibliothèques font partie des lieux culturels les plus fréquentés. Cette année de Covid a renforcé cette tendance car les bibliothèques ont été les seuls lieux ouverts.

Puis, au regard de leur mission et des outils qu’elles sont amenées à utiliser, les bibliothèques ont une légitimité à accompagner les citoyens et les sensibiliser aux enjeux du numérique.

Enfin, le rôle croissant du numérique dans la société et la place de plus en plus incontournable des géants de la tech nécessitent de développer un esprit critique et de réfléchir aux conséquences sur nos libertés mais aussi sur le fonctionnement de notre démocratie. La polémique autour de Cambridge Analytica et le rôle de Facebook en sont un exemple. L’ingérence Russe dans les élections américaines, les cyberattaques diligentées par la Chine ou la Corée du Nord ont des conséquences sur la vie politique et notre futur.

Si l’on part du principe que les bibliothèques participent à la construction du citoyen et doivent aider les usagers à se forger un esprit critique, il est de notre devoir de montrer ce qu’impliquent d’utiliser les outils des GAFAM ou de leurs homologues asiatiques. On ne peut pas laisser seules ces entreprises se positionner comme les défenseurs de la vie privée. Le droit à la vie privée en ligne ne peut pas reposer sur Apple et son dispositif de blocage du tracking publicitaire ou Google et son enfumage autour de la fin des cookies tiers.

Ce combat a peut-être une portée moins grande en France. Nous n’avons pas un événement national qui met l’accent sur la protection des données personnelles portées par des associations. Il y a bien évidemment des actions qui ont été organisées comme le FDLN ou JDLN mais cela reste des initiatives portées par des individus localement. Alors même qu’une part importante de la population se déclare sensible aux questions relatives à la vie privée, les représentants des associations professionnelles n’ont pas fait de ce sujet un axe fort de leur mandat. Ce n’est pas un reproche, c’est un constat. (Je tiens à le préciser pour éviter d’être accusé comme le râleur de service).

 

Ce n’est pas toujours évident de défendre ces sujets dans son établissement. Défendre la vie privée et le contrôle sur nos données personnelles, c’est défendre le chiffrement ou des outils destinés à préserver notre anonymat. Dans le contexte actuel, on peut être rapidement assimilé à un terroriste potentiel ou un pédocriminel. Ce n’est évidemment pas simple en ce moment de défendre des outils qui protègent notre intimité. Pourtant, ces outils sont indispensables pour garantir une société libre et démocratique.

L’année de Covid nous a prouvé que le chiffrement ou la protection des données personnelles sont fondamentaux pour chacun d’entre nous.

Avec le télétravail, combien d’entreprises ou de services de l’administration ont déployés des VPN pour organiser le télétravail et garantir la sécurité informatique du service et l’intégrité des données échangées ? Cela ne semble choquer personne d’utiliser le chiffrement dans ce cas.

Les périodes de confinement ont été une période particulièrement faste pour le commerce en ligne. Accepterions-nous de saisir nos coordonnées bancaires sans la moindre garantie de sécurité ? Le chiffrement est la solution pour nous permettre d’utiliser nos cartes bancaires en ligne.

La crise sanitaire a entraîné le développement des applications de contact tracing qui impliquent l’utilisation de données de santé considérées comme des données sensibles. Accepterions-nous que les données relatives à notre état de santé transitent en clair entre nos téléphones et les serveurs de Tous AntiCovid ?

Pendant un moment, l’idée du vote électronique a été mis sur la table dans la perspective des prochaines élections présidentielles. Accepterions-nous d’utiliser des machines à vote qui ne garantirait pas la confidentialité du suffrage ?

Le chiffrement est définitivement indispensable. Le remettre en cause au nom de la sécurité ou au nom de la lutte contre le terrorisme est une perspective redoutable pour l’équilibre démocratique de notre société. Il ne peut pas y avoir d’un côté un chiffrement fort pour des services commerciaux et de l’autre un chiffrement faible pour les réseaux sociaux ou les messageries chiffrées. Certes, ces outils sont utilisés à des fins criminelles. Mais fragiliser des outils qui garantissent la liberté d’expression indispensable dans une société libre, c’est renoncer aux droits fondamentaux qui la soutiennent.

Comment faire en tant que bibliothécaires ?

Les statuts de la fonction publique peuvent paraître incompatibles avec ces sujets. Mais on peut y prendre part de diverses façons :

  • Privilégier des outils libres comme Jitsi ou BigBlueButton pour les visios ;

  • Utiliser des moteurs de recherche alternatifs à Google et les configurer par défaut sur les ordinateurs publics ;

  • Privilégier les logiciels libres à installer sur ces machines ;

  • Acheter et faire la médiation des documents qui traitent des questions de surveillance ;

  • Animer des ateliers sur les données personnelles ;

  • Montrer comment l’authentification en deux étapes fonctionne ;

  • Comment créer un mot de passe et pourquoi il ne faut pas utiliser deux fois le même ;

  • Réapprendre nos habitudes numériques personnelles en privilégiant des alternatives respectueuses de la vie privée ;

  • Faire de la pédagogie sur ces sujets ;

A l’occasion de cette semaine consacrée à la vie privée, je publierai pendant 7 jours un article pour présenter une ressource, un service ou une action qui parlticipe à la défense de a vie privée et de nos données personnelles.

Si vous souhaitez partager un outil ou une expérience, n’hésitez pas à utiliser les commentaires !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*