Et si ouvrir plus, c’était en fait ouvrir sans les bibliothécaires ?

Le débat de la question des horaires d’ouvertures en bibliothèque agite régulièrement la profession. C’est indéniable, la France est à la traîne comparée à d’autres pays du nord de l’Europe ou nord-américains. Il y a des arguments valables qui sont recevables chez ceux qui sont favorables à l’ouverture mais aussi chez ceux qui sont contre. Mais peut-être que la solution ne réside pas uniquement dans l’emploi de vacataires ou de roulements compliqués à organiser. Bibliotheca est en train d’expérimenter le service open+ dans plusieurs bibliothèques américaines. Je spoile immédiatement ; les trois bibliothèques pilotes ne déplorent pour le moment aucune dégradation de la part des usagers. Nos confrères se sont évidemment posés la question de la sécurisation des espaces et des collections. (Les mineurs ne sont pas autorisés). Spoil bis, ça existe depuis 2007 en Europe.

Open+ est une solution qui est présentée comme un moyen d’élargir les horaires des bibliothèques…sans les bibliothécaires. Le système est assez simple. Il repose sur un système qui intègre un panneau de contrôle à l’extérieur de la bibliothèque. L’authentification s’effectue à travers la carte de la bibliothèque que l’usager scanne devant le panneau relié au SIGB de la bibliothèque. Le système de Bibliotheca prévoit également des caméras pour surveiller contrôler ce qui se passe dans les murs de la bibliothèque. Le dispositif est conçu pour qu’il n’y ait besoin d’aucune intervention humaine : système intégré de diffusion de message ou d’alerte, extinction programmée des lumières et des ordinateurs en libre service disséminés dans l’établissement. Un agent de sécurité a également été recruté… au cas où.

Open+ devant la bibliothèque de Gwinnet County Public Library
Open+ devant la bibliothèque de Gwinnett County Public Library

Mais si les bibliothèques fonctionnent sans bibliothécaire alors on peut supprimer des postes ? Une des bibliothèques qui expérimente ce projet explique que cela n’a pas engendré de réductions budgétaires ni de suppression de personnel. Bien au contraire, cela a été un moyen de repenser l’organisation du travail au sein d’un réseau qui avait été frappé par la crise de 2008. Le directeur de Gwinnett County Public Library explique qu’après la crise des subprimes, le budget de fonctionnement avait été amputé. Les réductions budgétaires ont éliminé de fait la moindre embauche. Aucune fermeture de bibliothèque n’avait été décidée mais cela impliquait une organisation compliquée pour assurer chaque ouverture d’annexe du réseau qui reposait sur un jeu de chaise musicale. Une ouvrait de telle heure à telle heure puis une autre prenait la relève. C’était illisible pour les usagers. La direction a négocié un projet de RFID qui s’est traduite par une refonte des banques d’accueil et une multiplication des automates de prêts. D’après le directeur de ce réseau, la RFID et le système de Bibliotheca ont permis de rajouter 105 heures d’ouverture sur l’ensemble du réseau. Selon lui, les contribuables payent à travers leurs impôts pour le fonctionnement des bibliothèques, il est donc normal de pouvoir leur fourni un accès qui soit le plus large possible. Enfin, comme l’explique très bien un des responsables, ce service ne vise pas à remplacer du personnel. C’est juste un moyen d’assurer un service minimum pour les usagers. Et il a bien raison, la valeur ajoutée ne réside absolument pas dans le bip d’une douchette mais plutôt dans l’accompagnement au choix et la recommandation de contenus, dans la promotion de la lecture ou encore dans le développement de compétences en littératie numérique.

Le retour de cette expérience semble plutôt positif d’après ces premiers tests. Les horaires sont élargis jusqu’à 22h en semaine ainsi que le week-end. La fréquentation a augmenté de plus de 8%. Quand aux usages, ils sont divers et variés. Le public vient pour lire la presse ou encore utiliser les ordinateur. Dans une autre bibliothèque, Open+ a été le moyen d’assurer une continuité du service pendant qu’une partie de la bibliothèque était en travaux. Grâce à open+, une petite partie avait été aménagée pour que les usagers puissent continuer à emprunter une partie des collections.

Alors pour ou contre une extension des horaires d’ouverture ? 😉

Source : Library Journal

6 commentaires à propos de “Et si ouvrir plus, c’était en fait ouvrir sans les bibliothécaires ?”

  1. Rétroliens : Une bibliothèque sans personnel, une bonne idée ?

  2. « Selon lui, les contribuables payent à travers leurs impôts pour le fonctionnement des bibliothèques, il est donc normal de pouvoir leur fourni un accès qui soit le plus large possible. »

    Hmmmm.

    C’est avec cet argument/rapport de cause à effet qu’on se dirige vers des bibliothèques où on pense sécurité DONC on met en place un « système qui intègre un panneau de contrôle » et des données via RFID.
    … vers des bibliothèques où la médiation est du genre « Si vous avez aimé ceci vous aimerez cela » ?

    Mais bon le service minimum est assuré.

  3. Un service d’accès public à l’information, le savoir et la culture ne peut que avoir des horaires qui correspondent aux disponibilités de la population. Donc, très élargies comme les supermarchés, adaptées aux populations locales…D’autant plus, si on le conçoit comme un 3e lieu (qui est à mon sens, indissociable de la mission principale d’accès à la culture, dans un rôle social et de médiation…). En fait, la question ne se pose donc pas. Le problème est comment ? car les répercussions en terme de personnel et de masse financière sont plutôt difficiles à gérer… pourquoi ne pas tester Open+ en France ? sur un site pilote ? Ce n’est qu’en testant que l’on verra les questions qui se posent, (par ex : RFID et « vie privée ») et aussi et donc le coût au final…..

  4. Rétroliens : Articles archivés | Pearltrees

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*